dossier 2
Info Juridique N° 218
Recours aux CDD
Les cas de recours autorisés au CDD
L'employeur ne peut signer un contrat de travail à durée déterminée (CDD) que dans certains cas limitativement énumérés. S'il signe un CDD en dehors de ces motifs de recours, il risque notamment la requalification en un contrat de travail à durée indéterminée.
Cas strictement limités
Recours exceptionnel.
- Le contrat de travail à durée indéterminée (CDI) constitue la forme normale et générale de la relation de travail (loi 2008-596 du 25 juin 2008, art. 1, 1 ;c. trav. art. L. 1221-2). Le contrat à durée déterminée (CDD) n'a donc qu'une vocation subsidiaire pour faire face à des situations particulières (accord national interprofessionnel du 24 mars 1990 ; loi 90-613 du 12 juillet 1990, art. 1).
Interdit pour les emplois permanents.
- Le CDD, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise (c. trav. art. L. 1242-1). Il ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire (c. trav.art. L. 1242-2).
Attention. Tout CDD conclu pour pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et
permanente de l'entreprise, ou en dehors des cas de recours énumérés par la loi, ou encore dans les cas où la conclusion de ce type de contrat est interdite, est réputé à durée indéterminée. Le recours irrégulier au contrat à durée déterminée est aussi sanctionné pénalement.
Motifs autorisés strictement limités.
- Le contrat de travail ne peut être conclu pour une durée déterminée que dans les cas suivants (c. trav. art. L. 1242-2) :
- remplacement d'un salarié ou du chef d'entreprise;
- accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise ;
- exécution de travaux temporaires par nature, c'est-à-dire correspondant à des emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité, il est d'usage
constant de ne pas recourir au CDI .
Cette liste est strictement limitative.
Le motif du recours à un CDD s'apprécie à la date de la conclusion du contrat (cass.
soc. 3 octobre 2000, n° 98-44431 FD).
Contrats liés à la politique de l'emploi
Contrats spécifiques pour certains publics.
- Le contrat de travail peut aussi être à durée déterminée lorsqu'il est conclu au titre de dispositions législatives et réglementaires destinées à favoriser l'embauchage de certaines catégories de personnes sans emploi (c.trav. art. L. 1242-3). Il s'agit notamment des contrats suivants : contrat insertion-revenu minimum d'activité (CIRMA) (c. trav. art. L. 5134-82) ; contrat initiative-emploi (c. trav.art. L. 5134-69), contrat d'avenir (c. trav. art. L. 5134-41), contrat d'accompagnement dans l'emploi (c. trav. art. L. 5134-41).
Compléments de formation professionnelle.
- Le contrat de travail peut également être conclu pour une durée déterminée lorsque l'employeur s'engage à assurer un complément de formation professionnelle aux salariés de certaines catégories. À titre d'illustration, le contrat de professionnalisation, contrat « générique » de la formation en alternance, peut prendre la forme d'un contrat à durée déterminée (c. trav. art L. 6325-5).
Remplacer un salarié
Situations de remplacement
Quatre cas de remplacement.
- L'entreprise peut embaucher en CDD pour remplacer (c. trav. art. L. 1242-2) :
- un salarié absent ou dont le contrat de travail est suspendu, hormis le cas de la grève) ;
- un salarié passé provisoirement à temps partiel ;
- un salarié dont le départ définitif précède la suppression de poste ;
- un salarié dans l'attente de l'arrivée de son remplaçant recruté par CDI .
Aménagement du terme.
- Le remplacement d'un salarié temporairement absent ou dont le contrat de travail est suspendu peut intervenir avant le départ du salarié à remplacer et prendre fin le surlendemain du jour où le salarié remplacé reprend son emploi.
Remplacement « en cascade »
Le salarié absent peut être remplacé par un autre salarié de l'entreprise et ce dernier par
le salarié recruté en CDD. Un tel remplacement en cascade est permis dès lors qu'il
résulte bien de l'absence d'un salarié de l'entreprise et qu'il n'a pas pour effet de faire
occuper un emploi permanent de l'entreprise (circ. min. DRT 18/90 du 30 octobre 1990 ;
cass. soc. 22 novembre 1995, n° 91-44480 BC V n° 308 ; cass. soc. 16 juillet 1997,
n° 94-42398, BC V n° 270 ; cass. soc. 30 avril 2003, n° 01-40937, BC V n° 149

.
Remplacer un salarié absent ou dont le contrat est suspendu
Contrat du salarié remplacé.
- L'employeur peut remplacer tout salarié de l'entreprise temporairement absent. Le salarié à remplacer peut donc être :
- en contrat à durée indéterminée ;
- en contrat à durée déterminée ;
- en contrat d'intérim.
Nature de l'absence.
- Toute absence ou suspension du contrat de travail peut donner lieu à la conclusion d'un CDD, à l'exception de la suspension résultant d'un conflit collectif du travail . Il peut s'agir de l'absence :
- dans l'entreprise,
- au poste de travail (à la suite d'une affectation temporaire sur un autre poste pour raisons médicales ou d'une mutation provisoire ou bien encore d'une promotion précédée d'une période d'adaptation) (circ. DRT 92/14 du 29 août 1992).
Ainsi, le CDD permet de faire face à toute absence :
- pour congés de toutes sortes (congés payés, congé pour événement familial, congé de
formation, congé maternité, congé parental d'éducation, congé pour création d'entreprise,
congé sabbatique, etc.) ;
- pour maladie ou accident.
Attention. Un CDD pour remplacement ne peut être conclu que pour remplacer un seul salarié déterminé et nommément désigné. Il ne peut donc pas être signé pour remplacer tout membre du personnel titulaire dès lors que celui-ci est en congé ou absent pour maladie, le risque étant la requalification en CDI (cass. soc. 24 février 1998, n° 95-41420, BC V n° 98). Il est également impossible de recruter un salarié en CDD en remplacement simultané de plusieurs salariés absents pour cause de congés payés, la sanction étant aussi la requalification en CDI (cass. soc. 28 juin 2006, n° 04-40455 BC V n° 228 ; cass. soc. 14 juin 2006, n° 04-45365 FD).
Remplacer un salarié passé provisoirement à temps partiel
Dans le cadre d'un avenant au contrat de travail ou par échange écrit. -
L'employeur peut conclure un CDD pour remplacer un salarié passé provisoirement à temps
partiel dans le cadre d'un avenant au contrat de travail ou par échange écrit entre ce salarié et son employeur (c. trav. art. L. 1242-2).
Situations visées.
- En fait, l'employeur peut remplacer un salarié passé temporairement à temps partiel :
- pour créer ou reprendre une entreprise (c. trav. art. L. 3142-78) ;
- dans le cadre d'un congé parental d'éducation (c. trav. art. L. 1225-47) ;
- dans le cadre d'un congé de solidarité familiale (c. trav. art. L. 3142-46).
Compte tenu de ces dispositions, il semble envisageable que ce nouveau cas de
recours soit aussi applicable dans l'hypothèse d'un passage provisoire à temps
partiel convenu entre l'employeur et le salarié pour convenance personnelle, c'est-àdire
en dehors des cas de passages provisoires à temps partiel prévus par le code du
travail.
A contrario, le salarié ne peut pas être recruté pour exécuter le complément de travail d'un ou de plusieurs salariés employés de façon permanente à temps partiel. Dès lors, le CDD conclu pour exécuter le complément de travail de plusieurs salariés employés de façon
permanente à temps partiel, dans l'attente d'une demande de leur part d'un travail à temps complet, doit être requalifié en CDI (cass. soc. 12 juillet 1999, n° 96-45473, BC V n° 343).
De même, le salarié ne peut être recruté pour occuper le temps libéré par des salariés à la
suite de la réduction de leur temps de travail (cass. soc. 8 février 2005, n° 62-44454 FD).
Remplacement partiel
L'employeur peut ne remplacer que partiellement le salarié absent. Il peut donc
embaucher en CDD un salarié de qualification inférieure au salarié remplacé et lui verser
une rémunération moins importante dès lors qu'il ne lui demande d'effectuer qu'une
partie des tâches du salarié absent (circ. min. DRT 92/14 du 9 août 1992 ; cass. soc.
15 octobre 2002, n° 00- 40623, BC V, n° 305 ; voir § 132). Il est prudent de préciser
dans le contrat non seulement les tâches qui doivent être accomplies mais aussi celles qui
ne doivent pas l'être.
Remplacer un salarié dont le départ précède la suppression du Poste
Principe.
- L'embauche d'un salarié en CDD est possible pour pourvoir un poste de travail
devenu vacant mais temporairement maintenu (c. trav. art. L. 1242-2). En pratique, ce cas de recours devrait s'inscrire le plus souvent dans le cadre d'une procédure de licenciement économique.
Attention. L'accord national interprofessionnel du 24 mars 1990 relatif aux contrats à durée déterminée et au travail temporaire prévoit qu'un CDD peut être conclu pour remplacer un salarié sous CDI ayant définitivement quitté son poste de travail et ne pouvant être remplacé par un autre salarié sous CDI, en raison d'arrêts d'activité ou de changements de techniques de production ou de matériels expressément prévus. Cet accord du 24 mars 1990 est obligatoire pour tout le secteur privé de l'économie, à l'exclusion des professions agricoles. Il a été étendu et élargi par arrêté du 9 octobre 1990 (JO du 14).
Conditions.
- Le remplacement d'un salarié dont le départ définitif précède la suppression de son poste par CDD ne peut s'effectuer que dans les conditions suivantes :
- le départ du salarié titulaire d'un CDI doit être définitif, quel que soit le motif à l'origine de ce départ ;
- la suppression de poste doit être effectivement décidée (l'accord national interprofessionnel du 24 mars 1990 prévoit qu'elle doit intervenir dans un délai maximal de vingt-quatre mois).
Enfin, préalablement au recrutement du salarié en CDD, l'employeur doit consulter le comité d'entreprise à double titre (ou, à défaut, les délégués du personnel) :
- sur la réorganisation envisagée ainsi que sur les mesures à l'origine de la compression
d'effectif ;
- sur la décision de recourir au CDD (c. trav. art. L. 1242-2 et L. 2323-6 ; accord
interprofessionnel du 24 mars 1990).
Dans les entreprises sans comité d'entreprise ni délégué du personnel, ces
consultations ne peuvent pas avoir lieu. Le recours au CDD reste toutefois possible,
que celles-ci soient tenues ou non de mettre en place un comité d'entreprise ou des
délégués du personnel. En effet, le code du travail ne subordonne pas la conclusion
d'un CDD pour le motif ici traité à un seuil d'effectif minimum (circ. DRT 92/14 du
29 août 1994 ; rép. min. 35848, JO AN Q 15 avril 1991, p. 1531).
Remplacer un salarié dans l'attente de l'arrivée de son remplaçant
Vacance ou création de poste.
- Il peut être fait appel à un salarié embauché en CDD pour occuper le poste laissé vacant par un salarié sous CDI dans l'attente de l'entrée en service effective du nouveau salarié recruté sous CDI pour tenir ce poste (c. trav. art.L. 1242-2).
La vacance de poste peut résulter soit du départ définitif de l'entreprise du salarié
titulaire du poste (licenciement, démission, départ ou mise à la retraite, départ
négocié, etc.), soit de sa mutation définitive à l'intérieur de celle-ci (circ. min. DRT
18/90 du 30 octobre 1990). L'employeur peut aussi conclure un CDD pour occuper
provisoirement un poste nouvellement créé dans l'attente de l'entrée effective du
salarié embauché par CDI pour pourvoir ce nouveau poste (circ. min. DRT 92/14 du
29 août 1992).
Conditions.
- Il faut qu'il y ait réellement vacance de poste. Un employeur ne peut donc
pas embaucher un salarié par CDD en se contentant d'invoquer le départ imminent du salarié sous CDI : celui-ci doit avoir effectivement quitté l'entreprise ou son poste (circ. min. DRT 18/90 du 30 octobre 1990).
Enfin, le nouveau salarié permanent doit avoir été recruté. C'est seulement la date de son
arrivée qui est différée, mais dans la limite de neuf mois. Il s'ensuit que la durée du CDD
conclu dans l'attente de son arrivée ne peut pas excéder neuf mois ( c. trav. art.L. 1242-8).
Il peut s'agir d'un salarié qui n'est pas immédiatement disponible car il doit effectuer
un préavis chez son précédent employeur (circ. min. DRT 92/14 du 29 août 1992).
En conclusion, un tel CDD ne peut être conclu que lorsque le recrutement du nouveau salarié
permanent est effectué. Son entrée en service se trouve retardée du fait de son
indisponibilité provisoire (cass. soc. 9 mars 2005, n° 03-40386 BC V n° 80).
Remplacement du chef d'entreprise
Un CDD peut aussi être conclu pour :
- remplacer un pharmacien titulaire d'officine, un directeur de laboratoire ou directeur
adjoint, d'analyses de biologie médicale (c. santé pub. art. L. 5125-21, al. 1 et 3 et art.
L. 6221-11) ;
- remplacer un chef d'exploitation ou d'entreprise agricole, un aide familial, un associé
d'exploitation ou leur conjoint, dès lors qu'il participe effectivement à l'activité de
l'entreprise ou de l'exploitation agricole (c. rural art. L. 722-1 et L. 722-10) ;
- remplacer un chef d'entreprise artisanale, industrielle ou commerciale, une personne
exerçant une profession libérale, le conjoint participant effectivement à l'activité de
l'entreprise à titre professionnel et habituel, un associé non salarié d'une société civile
professionnelle, d'une société civile de moyens ou d'une société d'exercice libéral (c. trav
art. L.1242-2 ).
Le nouveau salarié permanent dont l'arrivée sur le poste est attendue peut aussi
être un salarié déjà titulaire d'un CDI dans l'entreprise ayant fait l'objet d'une
mutation interne (circ. min. DRT 92/14 du 29 août 1992).
A+
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