Comment se remotiver ?
Publié : 30 juin 2022 11:09
Bonjour à toutes et à tous,
Je vous écris pour tenter de trouver le bout du tunnel face à un mal-être professionnel. Peut-être ne suis-je pas la seule dans cette situation. Je m'explique.
Je suis relativement jeune diplômée ASS, de 2019.
Depuis, je travaille dans une association où mes 2 principales missions sont :
1. L'inclusion numérique du public tsigane sédentarisé via VAD (75% de mon ETP)
2. L'accompagnement à l'insertion de bénéficiaires RSA via VAD (tsiganes sédentarisés majoritairement)
Ma perte de motivation concerne ces 2 missions, pour des raisons différentes.
Concernant l'accompagnement numérique, au début je trouvais cela sympathique. Une bouffée d'air pour sortir du social pur. Le public est agréable. Cependant, au fil du temps, je me questionne sur le fait d'avoir fait ces études pour finir à 75% sur une mission de type service civique... Les ASS m'orientent les bénéficiaires pour que je fasse je dirais "le sale travail" (passer des heures au téléphone avec Ameli pour ouvrir un fichu compte, créer les comptes Pole Emploi, CAF, galérer avec France Connect et ANTS, repasser 5 fois pour les trouver les documents). Je suis considérée comme simple animatrice et cela me frustre. Les démarches sont aussi très répétitives et longues.
Concernant l'accompagnement RSA des tsiganes, je crois que cela centralise ma plus grande frustration. Le plus dur, c'est qu'en tant que travailleuse sociale, on me reproche cette frustration. Mais je suis humaine, je travaille (un travail difficile, peu reconnu, peu valorisé) et je vois ces dizaines et dizaines de familles sur des terrains, toutes au RSA avec des enfants non-scolarisés. Avec des couples non-déclarés, qui bénéficient donc de plus de prestations. Je ne vois pas de personnes en emploi, ni qui souhaitent travailler. Je vois des factures qui ne sont pas payées depuis des mois, avec des montants astronomiques, qui continuent à grimper car les fournisseurs, huissiers et forces de l'ordre ont peur de se rendre sur place pour sanctionner ce public. Je perd ma crédibilité en tentant de prévenir des conséquences qui n'arrivent jamais. Et je suis sollicitée dès que les échéances le permettent, pour accompagner l'instruction de FSL, surendettement, colis alimentaires, ...
La goutte d'eau, c'est que nous réalisons des ateliers créatifs parents-enfants avec les tsiganes pour tenter de préparer un rythme scolaire, apprendre à des enfants de 10 ans à écrire leur prénom, travailler l'implication du parent dans le développement de l'enfant... Pour cela nous louons une salle, achetons le matériel, un gouter, démarchons, parfois nous cherchons les personnes directement pour les emmener...
Et mon nouveau collègue animateur constate que les parents déposent les enfants et partent en nous prenant pour garderie, ce que nous ne sommes pas... Hier, il en discute avec les enfants, qui lui disent que les parents ne viennent pas participer car il ressemble à "une tapette".
Est-ce qu'il va rester après cela ? Ou cela sera un collègue de plus qui partira ?
Je ne me sens pas valorisée dans mon métier, mais surtout pour ma mission de RSA j'ai l'impression de brasser de l'air. En bientôt 3 ans d'accompagnement, les situations s'empirent. Les financeurs nous rappellent que le RSA est temporaire, qu'il y a des engagements, mais le public parvient toujours à les contourner.
Cependant j'aime mon association, mon équipe, notre direction, la liberté d'organisation que nous avons. Je n'ai jamais eu cela ailleurs et n'ai pas envie de le quitter. Je ne me sens pas non plus en danger face au public. Je ne pense pas être dégoutée du métier, car j'ai toujours souhaité travailler dans l'humain. Mais j'ai l'impression de stagner, d'être utilisée, de ne voir vraiment aucun résultat.
J'accompagne des personnes vers une insertion qu'elles ne souhaitent pas, car cela serait trop différent de leur mode de vie et car elles ont la possibilité de vivre de la CAF pendant des décennies. Voir toute une vie. Ils sont homophobes envers mon collègue, racistes envers ma stagiaire, qui ne sont là que pour les accompagner...
Je ne suis pas sûre que ce soit le public tsigane l'unique problème, car je trouverai peut-être d'autres causes de frustration sur un autre public. Je pense que j'ai besoin d'espoir.
Qu'en pensez-vous ? Que pourrais-je faire pour trouver du positif dans tout cela ... ?
PS : Fin mai, je participe à ma première grève et manifestation des travailleurs sociaux avec mon équipe, soutenue par la direction, en lien avec le Ségur que nous ne percevons pas. Et je suis concernée de voir que seulement 200 personnes se sont réunies, et que les 2 syndicats ne sont pas tombés d'accord pour mutualiser les manifestations...
Je vous écris pour tenter de trouver le bout du tunnel face à un mal-être professionnel. Peut-être ne suis-je pas la seule dans cette situation. Je m'explique.
Je suis relativement jeune diplômée ASS, de 2019.
Depuis, je travaille dans une association où mes 2 principales missions sont :
1. L'inclusion numérique du public tsigane sédentarisé via VAD (75% de mon ETP)
2. L'accompagnement à l'insertion de bénéficiaires RSA via VAD (tsiganes sédentarisés majoritairement)
Ma perte de motivation concerne ces 2 missions, pour des raisons différentes.
Concernant l'accompagnement numérique, au début je trouvais cela sympathique. Une bouffée d'air pour sortir du social pur. Le public est agréable. Cependant, au fil du temps, je me questionne sur le fait d'avoir fait ces études pour finir à 75% sur une mission de type service civique... Les ASS m'orientent les bénéficiaires pour que je fasse je dirais "le sale travail" (passer des heures au téléphone avec Ameli pour ouvrir un fichu compte, créer les comptes Pole Emploi, CAF, galérer avec France Connect et ANTS, repasser 5 fois pour les trouver les documents). Je suis considérée comme simple animatrice et cela me frustre. Les démarches sont aussi très répétitives et longues.
Concernant l'accompagnement RSA des tsiganes, je crois que cela centralise ma plus grande frustration. Le plus dur, c'est qu'en tant que travailleuse sociale, on me reproche cette frustration. Mais je suis humaine, je travaille (un travail difficile, peu reconnu, peu valorisé) et je vois ces dizaines et dizaines de familles sur des terrains, toutes au RSA avec des enfants non-scolarisés. Avec des couples non-déclarés, qui bénéficient donc de plus de prestations. Je ne vois pas de personnes en emploi, ni qui souhaitent travailler. Je vois des factures qui ne sont pas payées depuis des mois, avec des montants astronomiques, qui continuent à grimper car les fournisseurs, huissiers et forces de l'ordre ont peur de se rendre sur place pour sanctionner ce public. Je perd ma crédibilité en tentant de prévenir des conséquences qui n'arrivent jamais. Et je suis sollicitée dès que les échéances le permettent, pour accompagner l'instruction de FSL, surendettement, colis alimentaires, ...
La goutte d'eau, c'est que nous réalisons des ateliers créatifs parents-enfants avec les tsiganes pour tenter de préparer un rythme scolaire, apprendre à des enfants de 10 ans à écrire leur prénom, travailler l'implication du parent dans le développement de l'enfant... Pour cela nous louons une salle, achetons le matériel, un gouter, démarchons, parfois nous cherchons les personnes directement pour les emmener...
Et mon nouveau collègue animateur constate que les parents déposent les enfants et partent en nous prenant pour garderie, ce que nous ne sommes pas... Hier, il en discute avec les enfants, qui lui disent que les parents ne viennent pas participer car il ressemble à "une tapette".
Est-ce qu'il va rester après cela ? Ou cela sera un collègue de plus qui partira ?
Je ne me sens pas valorisée dans mon métier, mais surtout pour ma mission de RSA j'ai l'impression de brasser de l'air. En bientôt 3 ans d'accompagnement, les situations s'empirent. Les financeurs nous rappellent que le RSA est temporaire, qu'il y a des engagements, mais le public parvient toujours à les contourner.
Cependant j'aime mon association, mon équipe, notre direction, la liberté d'organisation que nous avons. Je n'ai jamais eu cela ailleurs et n'ai pas envie de le quitter. Je ne me sens pas non plus en danger face au public. Je ne pense pas être dégoutée du métier, car j'ai toujours souhaité travailler dans l'humain. Mais j'ai l'impression de stagner, d'être utilisée, de ne voir vraiment aucun résultat.
J'accompagne des personnes vers une insertion qu'elles ne souhaitent pas, car cela serait trop différent de leur mode de vie et car elles ont la possibilité de vivre de la CAF pendant des décennies. Voir toute une vie. Ils sont homophobes envers mon collègue, racistes envers ma stagiaire, qui ne sont là que pour les accompagner...
Je ne suis pas sûre que ce soit le public tsigane l'unique problème, car je trouverai peut-être d'autres causes de frustration sur un autre public. Je pense que j'ai besoin d'espoir.
Qu'en pensez-vous ? Que pourrais-je faire pour trouver du positif dans tout cela ... ?
PS : Fin mai, je participe à ma première grève et manifestation des travailleurs sociaux avec mon équipe, soutenue par la direction, en lien avec le Ségur que nous ne percevons pas. Et je suis concernée de voir que seulement 200 personnes se sont réunies, et que les 2 syndicats ne sont pas tombés d'accord pour mutualiser les manifestations...