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l'ange et la bête: fiche de lecture

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andre DACHEVILLE

Re: l'ange et la bête: fiche de lecture

Message non lu par andre DACHEVILLE » 26 mai 2008 15:57

je viens de découvrir ta sympathique proposition concernant ta fiche de lecture sur "l'ange et la bête" de Giami. Peux-tu me la faire parvenir stp? Je suis en plein dedans et dois rendre ma fiche pour fin juin ! Peut-être seras-tu intéressée par ma fiche de lecture sur "Stigmates" de Goffman (j'ai obtenu une belle note )ou, en retour, ma propre fiche de lecture sur "l'ange et la bête" Merci pour ton éventuel envoi ! Cordialement !!

supertoto

Re: l'ange et la bête: fiche de lecture

Message non lu par supertoto » 29 mai 2008 16:56

Juste pour vous demander... Vous avez vu que Alain Giami avait posté sur ce forum et vous avait proposé son aide ?

Emily

Re: l'Ange et la Bête: fiche de lecture

Message non lu par Emily » 30 mai 2008 00:36

Bonjour Alain GIAMI,
Je suis Emily, étudiante éducatrice spécialisée en 3ème et dernière année au CFPES-CEMEA d'AUBERVILLIERS. Mon responsable de promo et mon tuteur mémoire est Henry YANOWITZ.
Il m'a dit que vous étiez des connaissances!
Mon sujet de mémoire est: "La prise en compte de la sexualité des adolescents handicapés mentaux, (entre respect et protection)".
Je vais soutenir mon mémoire le 5 juin à Arcueil!
Je voulais savoir si vous accepteriez que je vous envoie mon mémoire par mail, si vous pouviez le lire en diagonale, et si vous aviez des conseils ou des tuyaux à me donner ou des ptits plus pour m'aider, des exemples explicites ou de belles citations ou je ne sais pas..., si vous avez envie de me dire des choses à se sujet.
Bref, je ne sais pas si vous avez compris quelque chose à mon charabia...
Je vous laisse mon e-mail: mimile2811@hotmail.com
Si vous souhaitez que je vous envoie mon mémoire, laissez moi votre e-mail.
Je vous remercie d'avance!
Et à bientôt jespère...
*Emily*

linou

Re: l'ange et la bête: fiche de lecture

Message non lu par linou » 30 nov. 2008 23:30

je serai moi aussi interessé par cette fiche de lecture.... l'ange et la bete et un livre introuvable et/ou epuisé dans ma region.... qq un peut -il me mailer cette fiche svp....

dacheville

Re: l'ange et la bête: fiche de lecture

Message non lu par dacheville » 01 déc. 2008 14:22




L’ANGE OU LA BETE
Représentations de la sexualité des handicapés mentaux par les parents et les éducateurs





GIAMI Alain

HUMBERT Chantal
LAVAL Dominique

CTNERHI 2001
126 pages

Alain Giami, né le 27 janvier 1952, est un chercheur français en sciences sociales. Titulaire d'un doctorat en psychologie, obtenu en 1978 à l'Université Paris 7, il est chercheur à l'Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale depuis 1987, et actuellement Directeur de recherche à l'INSERM (U 822).
Travail
Il travaille sur différents aspects psychologiques, sociologiques et historiques liés à la sexualité : sexualité des handicapés, éducation sexuelle, contraception et stérilisation, comportements sexuels en population générale, prévention du sida, dysfonctions sexuelles et traitements de l'impuissance. Il a participé à l'enquête ACSF (Analyse des comportements sexuels en France, 1993) et développe actuellement des travaux qualitatifs sur l'expérience subjective de la sexualité et un programme de recherche sur la sexologie en Europe et en Amérique Latine, au Brésil principalement.
Il travaille sur la médicalisation de la sexualité : histoire des idées médicales sur la sexualité, attitudes des médecins et des infirmières face à la sexualité, la profession de sexologue, les traitements de l'infertilité et les conséquences des états de santé sur la vie sexuelle.
Il a été consulté à différentes reprises, comme expert auprès de la Direction générale de la santé et du Comité consultatif national d'éthique.
Ouvrages
· Giami, A., Schiltz et M.-A. (éd.), L'Expérience de la sexualité chez de jeunes adultes : entre errance et conjugalité, Paris, éditions Inserm, 2004.
· Giami, A., Humbert, C. et Laval, D., L'ange et la Bête : Représentations de la sexualité des handicapés mentaux par les parents et les éducateurs, Paris, éditions du CTNERHI, 2001 (réédition de l'ouvrage publié en 1983) [traduit en portugais au Brésil en 2004].
· Giami A., et Leridon, H. (éd.), Les enjeux de la stérilisation, Paris, éditions INSERM-INED, 2000.
· Giami, A. et Pietri, L. (éd.), Les traitements de l’impuissance, Paris, La Documentation française, 1999.
· Bajos, N., Bozon, M., Ferrand, A., Giami, A. et Spira, A. (éd.), La sexualité aux temps du sida, Paris, P.U.F., 1998.
· Giami, A., Veil, C. et le Groupe RITS, Des infirmières face au sida. Représentations et conduites, permanence et changements, Paris, éditions INSERM, 1994, 265 p. [traduit en portugais au Brésil en 1997].


Puisque mon mémoire a pour objet la sexualité des handicapés, j’ai commencé mes recherches par la lecture de ce livre. C’est un compte-rendu d’une enquête fondée sur des entretiens auprès des éducateurs et des parents d’enfants handicapés dans le cadre de 2 IME, d’un CAT et d’un foyer pour adultes handicapés. Son enquête, orientée vers les questions de la régulation de la sexualité, de la contraception et de la procréation en institution et en famille, a aussi mis l’accent sur les représentations qu’ont les parents et les éducateurs sur la sexualité des handicapés.

PREAMBULE

Cette recherche fait suite à un appel d’offre du C.I.R.M. « Problèmes de la sexualité dans les établissements d’adolescents et de jeunes déficients mentaux »
Mais quelle sexualité ? Celle des handicapés et /ou celle de leur entourage ? Le phallocentrisme ou celle de la recherche du plaisir ?
Objet retenu pour l’enquête : Réactions des parents et des éducateurs face à la vie sexuelle et affective des handicapés mentaux.

SITUATION DE LA QUESTION

Si la sexualité des handicapés a été souvent étudiée, il existe très peu d’études sur les réactions de l’entourage du handicapé face aux manifestations de sa sexualité. Quelques sondages permettent simplement de mettre en évidence l’extrême complexité des réponses (parents- institutions) et leur antagonisme.

NIVEAU DE L’APPROCHE

L’approche clinique a été retenue. Mais cette méthode engage fortement les chercheurs. Il est alors apparu que « l’équipe de chercheurs devait être composée de personnes situées dans des positions différentes par rapport à la recherche ». Elle a donc été composée d’un chercheur, d’une formatrice en école d’éducateurs spécialisés, et d’une mère d’adolescent handicapé avec, en plus, une supervision scientifique extérieure à l’équipe. Il a donc fallu, avant tout, que les membres se questionnent sur leurs propres relations avec l’objet de la recherche afin de mettre en évidence leurs propres mécanismes de défense et leur positions partisanes.




OBJECTIFS DE LA RECHERCHE

Il s’agit d’analyser les réactions parents -éducateurs, les conflits, leurs significations et leurs niveaux face aux manifestations de la vie sexuelle des handicapés.

HYPOTHESES DE DEPART

1) Les réactions éducateurs et handicapés en institution sont fortement affectives.
2) Cette affectivité déclenche chez l’éducateur un contre-transfert.
3) Elle alimente également une opposition forte parents-éducateurs.
4) L’éducation sexuelle des handicapés est source de conflits et apparaît comme un excellent analyseur des problèmes en institution.

METHODES D’INVESTIGATION

1) D’abord une pré-enquête : discussions libres entre parents et professionnels de l’éducation spécialisée afin de tester les hypothèses de départ et de la pertinence du choix de l’analyseur (éducation sexuelle).
2) Puis une enquête : entretiens semi-directifs de groupes et entretiens individuels des éducateurs et des parents dans le but de mettre en évidence la complexité des réactions face à l’analyseur choisi.

PRE-ENQUETE

Constitution d’un groupe de discussion libre composé par moitié de parents et de professionnels travaillant en institutions. Il sera demandé à chacun de préciser sa position par rapport à l‘analyseur. Ce dernier devrait permettre de mettre en évidence les modalités des conflits inter-groupes tout en évitant les blocages. En fait ce thème -l’éducation sexuelle- devrait fonctionner comme question-écran permettant d’aborder beaucoup d’autres thèmes sur la sexualité des handicapés mentaux.





COMPOSITION DU GROUPE

3 femmes, mères de handicapés adultes et souvent très impliquées.
3 professionnels travaillant en institution : une comptable, un psychologue et une directrice de CAT.
Discussions enregistrées et transcrites intégralement, ce qui permet un travail d’analyse approfondi de la part des chercheurs.
Niveaux d’analyse
- les interactions entre les membres
- les thèmes abordés.

LES INTERACTIONS ENTRE LES MEMBRES

Formation d’un sous-groupe (composé des parents et de la directrice du CAT) qui a travaillé en interaction positive et de collaboration.
La comptable a eu une attitude plutôt provocatrice mais réaliste. Ses propositions ont été rejetées comme venant d’une non-spécialiste.
Le psychologue a eu un questionnement plus nuancé et distancié mais suscitant souvent une surdité sélective ou un évitement de la part des parents.

THEMES ABORDES

La nomenclature des thèmes répertoriés ci-dessous méconnaît toute la charge émotionnelle qui les sous-tend.
1) Caractéristiques de la sexualité des handicapés : en fonction du type de handicap, du niveau de compréhension du handicapé et de la connaissance de son schéma corporel, dimension du « besoin »…
2) Attitudes face aux conduites sexuelles du handicapé : tolérance, encouragement, répression, suivant les comportements rencontrés…
3) L’enfant éventuel chez le handicapé : difficultés pré ou post-natales, attitude des parents, grands-parents, du corps social…
4) Autonomie du handicapé : autonomie sociale et psychologique, habitat, reconnaissance du désir...
5) Education sexuelle : contraception, connaissance du corps et des possibilités de communication, maîtrise du comportement…
6) Fantasmes liés à la contraception…
7) Travail et sexualité…
8) Institution : influence de la morale sexuelle personnelle des professionnels, conflit entre idéologies personnelles et institutionnelles …
9) Relations entre parents et professionnels : représentation de chaque groupe par l’autre…

Cette pré-enquête a mis en évidence un certain nombre de difficultés :
- les discours sur la sexualité des handicapés varient fortement selon le cadre ou la situation dans lesquels ils adviennent,
- de plus, parents et professionnels n’ont pas la même perception des manifestations de la sexualité des handicapés et encore moins, semble-t-il, des pratiques de sa régulation et de sa gestion
- tout oscille entre collaboration et rejet.
Cela oblige à repréciser le cadre méthodologique et théorique de la recherche .

PROBLEMATIQUE ET METHODOLOGIE

La méthodologie employée dans la pré-enquête semblait la mieux adaptée à une bonne médiation entre les hypothèses de départ et l’objet de la recherche. Mais n’a-t-elle pas rejeté des éléments « parasites » afin d’infirmer les hypothèses de départ ? Ne faut-il pas revoir cette médiation (les hypothèses et la problématique) et les techniques de recueil d’informations ?

TECHNIQUE DE RECUEIL DU MATERIEL

La technique de l‘entretien de style non-directif jusqu’ici employée, basée sur la production de discours, a, en fait, permis aux acteurs de parler de la sexualité des handicapés mentaux alors que le thème explicite était « l’éducation sexuelle des handicapés mentaux ».Ce thème a donc permis de parler sans drame et de façon socialement acceptable de la sexualité des handicapés, tant au point de vue des acteurs que des chercheurs, même s’il a fait apparaître rapidement des conflits dans les positions et les représentations de chacun des interlocuteurs, les parents étant engagés dans une problématique personnelle très impliquante tandis que les éducateurs essentiellement sur le terrain de leurs pratiques professionnelles.
Mais il s’est avéré nécessaire de réviser les hypothèses de départ et de recentrer le niveau d’analyse.



LES HYPOTHESES

L’hypothèse générale de départ - conflit entre parents et éducateurs à propos de la vie sexuelle des handicapés - a été pleinement vérifiée. Mais les hypothèses explicatives étaient basées surtout sur les conflits d’ordre affectif entre les différents groupes d’intervenants. Or le matériel de recueillement des données ne permet pas d’analyser finement cette affectivité. Il a donc été nécessaire de replacer les hypothèses sur le « concept de représentations et de conflits de représentations entre parents et éducateurs ».

CONCEPT DE REPRESENTATION

De toutes les fonctions de la représentation sociale, l’élaboration individuelle de la représentation par les acteurs est celle qui a été retenue, dans un premier temps, par l’équipe des chercheurs. Cette élaboration ne pourra cependant pas faire l’objet d’une représentation sociale (collective) eu égard au petit nombre de personnes interrogées et au caractère spécial de la recherche qu’est la sexualité. Elle sera élargie simplement aux membres d’un groupe défini par sa position par rapport aux handicapés. On tentera donc de repérer les éléments révélateurs liés à la position personnelle des acteurs et à leur fantasmatique sexuelle car il semble évident que leurs positions auprès des handicapés et les relations qu’ils nouent avec eux jouent un rôle important dans le processus d’élaboration.
« La représentation est l’activité psychologique qui consiste à construire un objet (ici la sexualité des handicapés) en associant des éléments de perception extérieurs et des éléments liés à la fantasmatisation individuelle, le tout en relation avec la position occupée par rapport à l’objet. »

REPRESENTATION, CONDUITE ET REPRESENTATION DE LA CONDUITE

La méthode d’investigation par le discours ne permet pas, évidemment, l’observation directe des comportements des acteurs face aux problèmes sexuels des handicapés. Cependant les discours permettent de construire la représentation de la sexualité des handicapés mentaux et la représentation des conduites à l’égard de cette sexualité des différents acteurs.

REPRESENTATION DE L’AUTRE GROUPE

Le matériel recueilli a permis de mettre en évidence que chaque groupe d’acteurs se fait, par des contacts directs effectifs, une représentation de l’autre groupe mais que chaque groupe se fait aussi une représentation des représentations des conduites de l’autre groupe.
« Je sais ce que tu penses et ce que tu fais et je sais aussi ce que tu penses de moi et de ma conduite ».
Cela aboutit ainsi à élaborer deux systèmes de représentations (le système des éducateurs et le système des parents) qui vont constituer les deux pôles du conflit entre les deux groupes.

LA CONSTRUCTION DE LA GRILLE D'ANALYSE

L'utilisation du concept de représentation et l'élaboration des « systèmes de représentation nécessite à la construction d’une grille d'analyse
Il s'agit de découper les discours recueillis suivant deux perspectives : découpage en thèmes et découpage des thèmes en fonction du niveau auquel on les situe.
Les thèmes retenus :
1 / Soi comme être sexué.
2 / Extérieur et handicapé.
3 / Sexualité des handicapés mentaux.
4 / Sexualité et niveau de handicap.
5 / Sexualité et différence des sexes.
6 1 Couple de handicapés.
7 / Enfant du handicapé.
8 / Relation entre le handicapé et ses parents.
9 / Personnalité du handicapé.
10 1 éducation sexuelle.
11 / Contraceptions.
12 1 Avortement.
13 / Travail et sexualité.
14 1 Institution.
15 1 Relations directes entre les deux groupes.
16 / Idéal.










DECOUPAGE DES THEMES :

Représentations Représentation du locuteur Représentation de l’autre groupe
Représentations de la conduite Représentation de la conduite du locuteur Représentation de la conduite de l’autre groupe


ENQUETE

Contact direct est pris avec les éducateurs, individuellement, par le biais d'une école de formation sans passer par la voie hiérarchique, afin d'éviter l'intervention éventuelle de l’institution. Les entretiens sont présentés comme une recherche sur l'éducation sexuelle des handicapés mentaux et se sont déroulés dans des endroits « neutres ».
Mais dans un deuxième temps, l’enquête s’est faite en institution et cela a soulevé des problèmes. En effet, nos interventions ont toujours fait l’objet d'un enjeu institutionnel, voire d'un conflit : impossible de réunir tout le personnel ou d’obtenir la participation de toutes les catégories professionnelles. L’absence des uns ou des autres a fonctionné comme analyseur des conflits en cours dans les institutions ou comme « supports de représentations et objets d'affect, le plus souvent négatifs ».
1) INSTITUTIONS
CAT - Foyer dans la région parisienne
Son psychologue s'est chargé d'organiser la réunion de groupe
Composition du groupe : la plupart des éducateurs et des moniteurs du foyer, une éducatrice technique du CAT et le psychologue.
Notre intervention arrivait après un grave problème du à la grossesse survenue chez une jeune femme handicapée quelques mois auparavant, problème qui avait opposé les parents de cette jeune femme et l'institution. A la suite de cela la direction de l'institution avait décidé d'instaurer une double règle :
- instauration de contraception obligatoire pour les filles du foyer ;
- interdiction absolue des rapports sexuels dans le cadre de l'institution.
Mais après bien des discussions rien n’avait été fait. Le psychologue comptait sur nos entretiens pour rouvrir le dossier de l’éducation sexuelle au sein de son établissement.
CAT à Paris
Après un tête-à-tête avec le directeur, l’équipe enquêteuse fut mise en contact avec l’équipe des éducateurs sans présentation de la part du directeur qui s’éclipsa. En fait, un violent conflit existait dans l’institution suite à la grossesse d’une jeune handicapée : l’équipe préconisait un IVG alors que le directeur avait convaincu la jeune handicapée de poursuivre sa grossesse.
Il fut impossible, dans cette atmosphère, d’obtenir des entretiens individuels même hors des heures de service.
IME - Banlieue parisienne
Prise de contact par l'intermédiaire d'une éducatrice spécialisée. Discussion de groupe avec I'éducatrice spécialisée et un éducateur technique. Puis entretiens individuels par la suite avec certains éducateurs. Là, pas de crise, mais peu d’intérêt pour l’éducation sexuelle des handicapés.
IME – Province

Contact établi par un éducateur spécialisé. Le directeur a accepté le principe d'une réunion de groupe (la presque totalité des éducateurs) mais n’y a pas participé. Là, aussi, antagonisme de l’équipe et de la direction sur l’opportunité de la régulation de la sexualité des handicapés de l’institution. Mais, vu la proximité des vacances d’été, pas d’entretiens individuels.

De manière générale, si les demandes d’interventions de l’équipe d’enquêteurs n’ont pas soulevé d’opposition forte « comme si les agents institutionnels souhaitaient donner une image d'ouverture, de tolérance et de capacité de remise en question par rapport aux problèmes de la sexualité » elles ont néanmoins mis en évidence de nouvelles sources de conflits internes.

2) LES CONTACTS AUPRÈS DES PARENTS

Le contact avec les parents fut difficile. L’enquête rejetait l’idée d’interviews de parents dans le cadre des institutions ainsi que ceux des parents militant dans des associations pour handicapés mentaux.
C’est au cours d’une Assemblée Générale de l’UNAPEI que des contacts furent pris avec des parents « pris au hasard » dans l’assemblée. Ce furent les seuls entretiens engagés avec des parents.

3) ECHANTILLONS CONSTITUES
Cet échantillon présente un fort décalage numérique entre les entretiens réalisés auprès des éducateurs et ceux réalisés auprès des parents. De plus il existe un fort décalage d’âge entre les éducateurs (19-42 ans) et les parents (40-66 ans).





LES REPRESENTATIONS DE LA SEXUALITE

1) LES EDUCATEURS

- Leurs représentations.
L’étude des documents recueillis a mis en évidence, chez les éducateurs, une fantasmatisation (individuelle ou collective) dans l’élaboration de leurs représentations de la sexualité des handicapés mentaux, représentations qui varient fortement selon qu’il s’agisse de locuteurs techniques ou éducatifs ou qu’il s’agisse d’établissements de jour ou de nuit.
a) Caractéristiques générales
La sexualité des handicapés apparaît à leurs yeux comme une sexualité essentiellement libidinale, sauvage, bestiale, irrépressible, ce qui n’aide pas à son expression relationnelle et hétérosexuelle, ni même, dans certains cas, son expression corporelle. Elle relèverait plutôt des rythmes saisonniers ou cosmiques, dans une dimension qui dépasserait les handicapés et qui s'imposerait à eux.
Ceci expliquerait l’absence de tendresse et d’affectivité dans leurs conduites sexuelles.
Mais paradoxalement cette représentation de la sexualité des handicapés mentaux n’affecte en rien le fort rapport d’affectivité existant entre éducateurs et handicapés. Or, cette affectivité des handicapés envers leurs éducateurs serait, selon ces derniers, « détachée de toute dimension libidinale ».
b) Sexualité et parole
Les éducateurs semblent accorder une place importante au verbiage des handicapés en institution, verbiage que certains assimileraient à des conduites substitutives de conduites sexuelles et comme le « paradigme de la sexualité des handicapés prise entre le débordement et l'inhibition. »
c) La masturbation
La masturbation, individuelle et/ou collective, reste une des figures dominantes de la sexualité des handicapés mentaux . Dans certains cas, elle apparaît comme révélatrice d’une « hypersexualité potentielle » qu’il faudra surveiller, dans d’autres, au contraire, elle exprime l’inhibition. Mais, dans aucun de ces cas, elle n’est réprimée ou interdite . Elle doit néanmoins rester discrète et se pratiquer dans la sphère privée. Il semble aussi que, pour les éducateurs, la masturbation serait « partie constitutive » de la sexualité des handicapés mentaux, c'est-à-dire comme « l'élément qui découle de 1'anormalité et qui empêche l'accès à la normalité ».

d) Les pratiques homosexuelles
Les pratiques homosexuelles sont tolérées (psychologiquement) parce qu’elles sont perçues comme une conséquence de la répression institutionnelle et parfois comme un mode de relation infantile et infantilisant.
Pour les éducateurs, c’est la vie institutionnelle qui semble être génératrice de pratiques homosexuelles de par la séparation des sexes et des interdits mis en place. Mais si elles sont tolérées au sein de l’établissement, les éducateurs ne méconnaissent pas leurs répercussions sur la vie sociale hors de l’établissement.

Toutes ces pratiques sexuelles sont prises dans un double mouvement entre le débordement pulsionnel et l'inhibition, entre fortes pulsions incontrôlables et l’impossibilité d’accéder aux relations sexuelles « normales ».

e) Les rapports sexuels génitaux et les rapports entre les sexes
Les relations entre les sexes semblent déterminées par la possibilité, l'impossibilité et l'interdit des rapports sexuels.
Les garçons et les filles handicapés n'auraient pas les mêmes désirs : il y aurait beaucoup d’agressivité chez les hommes (même si elle reste souvent à un niveau superficiel - verbiage - du fait de leur impossibilité à réaliser les rapports sexuels) et plus réfléchie chez les femmes.
Mais, il ne faut pas oublier que les rapports sexuels avérés en institution sont rares car sous le contrôle et le regard des personnels et de l’institution.
De ce fait, la vie en couple est quasiment absente des institutions car elle présuppose l'existence de liens stables entre les deux partenaires et la possibilité de leur cohabitation au sein de l’institution. La vie en couple n’est possible qu'à l'extérieur de la structure. Même si la vie en couple semble être le signe tangible de l’autonomie relative des handicapés (autonomie recherchée par l’institution) l’ensemble des éducateurs semble en nier la possibilité, du fait, selon eux, des contraintes institutionnelles et constitutionnelles.

En résumé, les éducateurs expliquent les pratiques sexuelles « perverses » et l’absence de relations sexuelles « normales » comme étant déterminées à la fois par l'interdit institutionnel et la constitution psychosexuelle des handicapés. Cet interdit et cette déficience fonctionnent, en fait, comme une instance de sécurisation.







- Les représentations que les éducateurs attribuent aux parents
Pour eux, les parents nient systématiquement la sexualité de leur(s) enfant(s) ce qui inciterait à des manifestations ostentatoires et agressives de leur sexualité au sein de l’institution, alors qu’eux affirment leur droit au plaisir et à la sexualité.

2) LES PARENTS
- Leurs représentations
Les parents parlent beaucoup moins de la sexualité de leur(s) enfant(s) (puisqu’ils la nient) et préfèrent parler de leur « immense affectivité » semblant par là désexualiser les handicapés.
Cette dénégation semble être le moyen de maintenir leur autorité sur leur enfant et de les maintenir dans une enfance éternelle.. Et si quelques fois ils admettent une certaine sexualité ils la déclarent « pure », détachée de la génitalité et facteur de stabilité relationnelle.
Les représentations que les parents attribuent aux éducateurs
Elles ont trait surtout à leurs pratiques professionnelles et à leur influence sur leurs enfants.
Ils auraient tendance à focaliser sur les pratiques sexuelles des handicapés et à négliger leur affectivité.

En résumé, il est clair que les représentations des deux groupes sont fondamentalement différentes : les liens qu’ils tissent avec les handicapés ne sont pas de même nature.
Les éducateurs, en général, se représente la sexualité des handicapés mentaux comme dépourvue d’affectivité et tournée essentiellement vers des pratiques non-génitales.
Les parents, en dehors de quelques pratiques masturbatoires et de quelques attouchements, leur « enfant »n'aurait pas de vie sexuelle, ni d'expression génitale mais déborderait d'affectivité.
Ces deux visions ne sont pas sans effet sur les représentations qu’ils se font les uns des autres.
Les uns (les éducateurs) reprochant la cécité des parents, les autres reprochant leur mauvaise influence sur leurs enfants.
Le fossé ne semble pas près d’être comblé.





LES REPRESENTATIONS DE L’AUTRE GROUPE

Comme ces deux groupes sont menés obligatoirement à collaborer, il semble judicieux de bien approfondir les représentations qu’ils se font les uns des autres.


1) LES REPRESENTATIONS DES PARENTS PAR LES ÉDUCATEURS
Pour les éducateurs, les parents persistent à percevoir et à considérer leur « enfant », comme un enfant éternel lui déniant, de ce fait, toute possibilité d'autonomie et de vie sexuelle, ce qui les maintient dans un état d'inquiétude permanent, amplifié par la séparation due au placement en institution. Pour les éducateurs, les parents ont des difficultés à accepter ce placement et à les investir de leur confiance. Ils se sentent donc, en plus de leur action auprès des handicapés, investis d’une mission auprès d’eux afin de les faire « évoluer » par rapport à leur propre problématique sexuelle. Ils dénoncent leur incohérence face aux problèmes de la contraception et des pratiques incestueuses.
« Cet ensemble tend à présenter les parents dans une position archaïque dominée par l'irrationnel et une dimension affective névrotique. »
En outre, ils pensent que les parents les perçoivent comme des spécialistes capables de bien gérer leur enfant handicapé mais aussi comme des personnes trop permissives favorisant la débauche de leur enfant.
Malgré cet antagonisme de représentations, la volonté de maintenir des relations entre les deux groupes reste forte de part et d’autre.



2) LES REPRESENTATIONS DES EDUCATEURS PAR LES PARENTS

Elles ne sont pas homogènes. Elles varient beaucoup selon le type de parenté : père ou mère de fils ou de fille.
Les mères se montrent souvent les plus virulentes face à « l’incapacité professionnelle des éducateurs », reprochant, pêle-mêle, leur manque de conscience sociale, leurs problèmes personnels, leurs idéologies générationnelles.
Les pères se montrent plus nuancés, trouvant chez le chef d’établissement compréhension, complicité, connivence, le trouvant plus réceptif quant à leurs difficultés et à leurs visions de l’éducation de leur enfant handicapé.
Mais il existe aussi une forte disparité entre les représentations que les parents se font entre eux : certains parents militants se présentant comme agent du changement et reprochant à certaines familles leur obscurantisme.
Les représentations que se font les éducateurs et les parents semblent donc irrémédiablement divergentes, chacun se posant en agent de changement. Les relations entre ces deux groupes sont néanmoins maintenues, chacun espérant faire évoluer l’autre.
« C'est en construisant la représentation de l'autre groupe que parents et éducateurs se mettent le plus à distance les uns des autres. »

LES REGULATIONS DE LA SEXUALITE EN FAMILLE ET EN INSTITUTION


La gestion de la sexualité dans les institutions est difficile à évaluer : difficile de trier la multitude de discours attribués tantôt à un groupe tantôt à l'autre, tantôt à l'institution, voire aux handicapés eux-mêmes. Cette gestion semble faite de compromis entre ce que l’on « doit » faire et ce que l’on « voudrait faire ».

1) LE DISCOURS DES ÉDUCATEURS
Il est souvent le reflet d’un malaise surtout chez les jeunes éducateurs peu formés. La sexualité des handicapés mentaux les renvoie parfois à leur propre sexualité provoquant un sentiment de dévoilement s’il venait à être obligé d’en parler. Cela provoque une certaine inhibition et un silence gêné.

a) Idéologie des éducateurs

Leur permissivité, position idéale des éducateurs, repose avant tout sur la reconnaissance des droits des handicapés, leur droit d’accéder à une autonomie y compris sur le plan sexuel.
Mais cette reconnaissance se situe toujours à un niveau de généralité et rarement par des actes concrets mettant en pratique leur conviction, leur idéal.
Malgré cela, le principe de la permissivité tient une place importante dans leurs discours.
Ils s’y présentent alors comme « obligés » d’avoir une position répressive face aux pressions institutionnelles et des parents mais tentant néanmoins de trouver des arguments « valables » à l’appui de la répression qu’ils pratiquent.



b) Les contraintes de l’institution
En première analyse, il semblerait que les règles de l’institution soient en contradiction avec les convictions et la permissivité des éducateurs. Mais, à un autre niveau d'écoute, les interdits institutionnels semblent leur rendre service, leur faisant, en bien des cas, l’économie de conflits. Même les règles très strictes édictées en situation de crise ne semblent pas lever de fortes contestations chez les éducateurs. Elles les libèrent du poids de la décision personnelle et leur permettent des « niches de tolérance ».
Certains, même, justifient l'interdit institutionnel par des impossibilités constitutionnelles des handicapés ou par les demandes des handicapés face à aux manifestations sexualisées de certains des leurs.
De plus, l'interdit institutionnel permet d'assurer « la cohésion et la cohérence des pratiques des éducateurs » que ce soit dans son application ou dans son opposition.
c) Les contraintes des parents
Les positions des parents paraissent très souvent comme un élément de contrainte qui oblige les éducateurs à modifier les conduites qu'ils souhaitent mettre en œuvre, comme une forte répression de la sexualité des leurs enfants handicapés et même comme une source permanente de conflits.
C’est à l’intérieur de cette multiplicité de positions que les éducateurs tentent d’élaborer ses conduites éducatives. Le statu quo qui s’en suit permet un « équilibre précaire entre leurs propres exigences, leurs idéaux et leurs pratiques. »

2) LES DISCOURS DES PARENTS
Deux aspects dominent leurs représentations de conduites : leurs relations directes avec leur « enfant » en situation familiale et les régulations qu'ils souhaitent voir appliquer dans les institutions par les éducateurs. S’ils dénient la sexualité de leur enfant ils n’en exigent pas moins une surveillance stricte, sur ce point, par l’institution.
En situation familiale :
Ils restent apparemment très attentifs aux « expressions de la sexualité de leur enfant », les surveillant et évitant toute situation favorisant cette expression.
En institution :
De manière générale, les parents apparaissent beaucoup plus soucieux que les éducateurs de surveiller, contrôler, voire même d'empêcher la possibilité des rapports sexuels pour les handicapés, et ils exigent des éducateurs qu'ils mettent en oeuvre cette surveillance dans les institutions.
Tout bien pensé, il ne semble pas que les représentations de conduites de régulation des deux groupes soient si divergentes que cela, les éducateurs trouvant auprès des exigences parentales une réponse à leur malaise face aux pratiques sexuelles des handicapés.

LA CONTRACEPTION ET ENFANT EVENTUEL

Plus que d’analyser les pratiques sur ce point, il est préférable de repérer la fantasmatisation qui les accompagne. Là aussi, les positions des deux groupes semblent antagonistes.

1) LE DISCOURS DES ÉDUCATEURS
La mise en place d’une contraception pour les handicapés mentaux reste source de conflits parmi les éducateurs. Pour les éducateurs masculins, la mise en place de la contraception féminine répond autant à un besoin de sécurité chez la handicapée que pour eux-même.

a) les transactions autour de la contraception
La prescription d’une contraception dans une pratique ponctuelle dictée par certaines circonstances semble, pour les éducateurs, plus acceptable qu’une prescription collective institutionnelle car elle s’inscrit dans le cadre d’une éducation sexuelle.
La contraception collective, même si elle allège la surveillance des handicapés quant à leurs pratiques sexuelles, elle n’en apparaît pas moins comme un moyen, pour l’institution, de se protéger des failles éventuelles de surveillance et comme une défense contre les attaques dont elle ferait l’objet.
Cependant, les éducateurs restent farouchement opposés à la stérilisation présentée comme la méthode préconisée par les parents.

b) Contraception et régulation sexuelles
La mise en place d’une contraception, fantasmée par certains éducateurs, semble à leurs yeux provoquer la levée des inhibitions et provoquer une sexualité débridée. Cette mise en place, couplée avec une interdiction de rapports sexuels au sein de l’établissement, semble mieux correspondre à leurs besoins de sécurité et à la protection du handicapé. Ils sont convaincus que les parents ne peuvent accepter cette proposition qui va à l’encontre de leur dénégation de la sexualité de leur « enfant ».

c) L'éventualité de l'enfant du handicapé
Fortement redoutée par les éducateurs, le désir de grossesse se manifeste souvent avec force chez les jeunes femmes handicapées. A leur demande, les éducateurs opposent une argumentation semblable à celle qu'ils construisent à propos de l'impossibilité supposée des rapports sexuels .
En résumé, les éducateurs se montrent plutôt opposés à l'éventualité d'un enfant chez les handicapés, en justifiant ce refus par leur incapacité à assumer son éducation dans les meilleures conditions.
Cette crainte de la grossesse constitue l'une des raisons qui conduit les éducateurs à adopter des conduites répressives, dans les régulations de la sexualité des handicapés (notamment les rapports sexuels) et la mise en place de la contraception.

2) LE DISCOURS DES PARENTS
Les parents se disent, en majorité, absolument favorables à la prescription d'une contraception et à la stérilisation des handicapés.

a) Transactions autour de la contraception et autour de la stérilisation
Pour les parents, la stérilisation constitue la méthode la plus efficace, la plus fiable. Mais, la prescription d'une méthode contraceptive fait toujours l'objet d'une transaction entre la mère et la fille. Sa mise en oeuvre est perçue, par la mère, comme une forme d'autorisation de relations sexualisées et sa non-mise en œuvre comme leur interdiction ou leur négation.
Pour les pères de handicapés, comme pour les éducateurs de sexe masculin, la contraception (ou la stérilisation) ne soulève pas de problèmes relationnels.
b) l’éventualité de l’enfant
Les parents semblent opposés à l'éventualité d'un enfant pour le handicapé. Pour eux les handicapés sont incapables d'élever leur enfant , que, fatalement, cette charge le reviendrait. Cet enfant, même s’il est normal serait, en tout état de cause, « handicapé » par le fait qu'il devrait être élevé par des parents handicapés. De plus, comme le handicapé est perçu comme un « enfant éternel », il est inconcevable qu’il procrée.

En conclusion : « Les éléments conflictuels des relations entre parents et éducateurs, à propos de la vie sexuelle et affective des handicapés mentaux, auraient pour fonction d'occulter les mécanismes de rejet, d'exclusion et de violence mis en place et assumés par les deux groupes.»

A propos de la masturbation :

J’ai effectué mon stage à responsabilité durant ma formation de moniteur éducateur au sein de l’Institut d’Education Motrice « PIERRE CAZIN » à Arras.
Cette structure accueille des enfants et des adolescents handicapés scolarisés dans l’établissement.
Personnellement, je n’avais jamais travaillé avec des handicapés en institut. Peu après mon arrivée, j’ai remarqué un jeune garçon qui, en fauteuil, se masturbait « frénétiquement », souvent en public (classe, réfectoire, salle de récréation…). Naturellement, cette attitude provoquait la stupéfaction chez beaucoup de personne « non-averties », l’indifférence débonnaire voire goguenarde des éducateurs mais surtout la colère des éducatrices qui voyait dans cette manifestation un acte d’agressivité envers leur sexe.
Au cours d’une discussion informelle avec l’une des éducatrices j’évoquai le sujet. La réponse fut sans ambigüité : « Les garçons handicapés sont très souvent « obsédés » sexuels, au comportement libidineux, sans retenue et sans tabous dans leur obsession et souvent agressifs ».
En poursuivant la discussion avec d’autres éducatrices, je me suis aperçu que cet avis était assez largement partagé même s’il était parfois teinté d’une certaine compréhension envers leurs pulsions. Par contre, je me suis rendu compte qu’elles n’avaient pas les mêmes positions concernant les filles de l’IEM qu’elles décrivaient comme étant loin des considérations sexuelles : d’après les éducatrices, elles étaient très sentimentales, ne voyant dans leurs relations avec la gente masculine que tendresse et sentimentalité.
Alain GIAMMI nous explique que les éducateurs/éducatrices ont une représentation de la sexualité des garçons handicapés très différente que ce soit sur la masturbation, l’homosexualité ou les rapports génitaux. « Ce sont les éducatrices qui dénoncent le plus vigoureusement le décalage entre les sexes, en situant le rôle de l’agressivité chez les garçons. Ainsi leurs pratiques de contrôle sont-elles représentées comme une protection. Par contre, pour les éducateurs du sexe masculin, l’agressivité des garçons handicapés reste à un niveau superficiel ». Mais tous s’accordent pour décrire le verbiage, la masturbation et l’homosexualité comme « des pratiques qui empêcheraient le développement psycho-sexuel normal des handicapés ».






A propos des rapports parents-éducateurs sur le sujet de la sexualité :

Je suis actuellement en stage au sein de l’APEI (association des parents d’enfants inadaptés) qui héberge des déficients mentaux de 30 a 60 ans travaillant le jour au sein d’un ESAT.
Après trois mois passés au foyer, j’ai reçu la mère d’un des résidents avec lequel j’avais noué une relation privilégiée.
Celui- ci, lors de nos discussions, évoquait souvent le fait qu’il aimerait « se mettre avec une fifille » Et de me citer une liste de femmes travaillant avec lui au sein de l’ESAT, fifilles qu’il trouvait particulièrement belles et avec qui… !!
Un jour, avec un large sourire et une pointe d’humour, j’évoquai devant la mère le fait que son fils parlait souvent de son désir d’avoir des relations avec une « fifille ». La mère m’expliqua que cela était l’expression du besoin irrépressible de tendresse que son fils manifestait envers tout le monde et envers elle-même en particulier mais que cela ne pouvait en aucun cas être des manifestations des pulsions sexuelles de son enfant, vu « qu’il n’était pas mûr de ce côté là… »


Elle continua, m’expliquant que son fils « singeait » les personnes non handicapées de son entourage mais qu’il fallait y voir une volonté de se sentir comme tout le monde, rien d’autre !! Enfin elle me fit comprendre clairement qu’il fallait préserver son fils de toute incitation (le mot sexuel ne fut pas prononcé) car cela pourrait créer un désordre chez lui, lui qui n’était encore qu’un enfant… Curieuse négation de son affirmation précédente !!

GIAMI a bien mis en évidence cette négation, par les parents, de la sexualité de leurs enfants handicapés : « En schématisant à l’extrême, les parents ont littéralement désexualisé les handicapés (surtout s’il s’agit de leur enfant) ». Ce qui leur permet « de maintenir présente l’image du handicapé qui reste un enfant éternel », un ange !! « Par contre, leurs enfants handicapés seraient des êtres débordants d’affectivité, celle-ci apparaissant comme l’élément déterminant de leur vie amoureuse relationnelle ».
Et aborder la question de leur sexualité semble, à leurs yeux, « constituer une menace profonde qui viendrait à remettre en question leurs projets et leur emprise sur le handicapé ».
De plus, la demande ( explicite ?) de la mère de ne pas inciter son enfant (à des pratiques sexuelles) montre bien, comme l’explique GIAMI, que « de manière générale, les parents apparaissent très soucieux de surveiller, contrôler, voire même d’empêcher la possibilité des rapports sexuels pour les handicapés et ils exigent des éducateurs qu’ils mettent en œuvre cette surveillance dans les institutions.»
Il est évident que cette pression des parents n’est pas sans effet sur les pratiques des éducateurs pris entre leurs idéaux, les règles strictes institutionnelles et les exigences parentales.

A propos de l’idéologie des éducateurs

Suite à ma décision de prendre pour sujet de mémoire « la sexualité des handicapés, j’entrepris d’en parler avec les éducateurs du foyer APEI dans lequel je suis en stage afin qu’ils me fassent part de leur(s) opinion(s) et de leur(s) positionnement(s) par rapport à ce sujet. Je lançais donc le débat lors d’une réunion informelle entre éducateurs du foyer.
Presque unanimement, les éducateurs se prononcèrent en faveur du droit des handicapés à avoir une sexualité autonome et le respect de leur vie privée.
Après avoir fait le tour de la question et annoncé clairement leur idéologie, ils me firent part de leurs difficultés à respecter leur positionnement à cause des freins inhérents à l’Institution :
- pas de chambres réservées aux couples.
- projet d’établissement stipulant qu’un étage était réservé aux femmes et un autre aux hommes.
- fiche de postes et expérience des éducateurs incompatibles avec l’accompagnement d’un couple de handicapés.
- direction se positionnant contre toutes manifestations sexuelles ou même sensuelles au sein de la structure.
Cette idéologie, qualifiée de « permissive » par GIAMI, semble le lot commun de tous les éducateurs et, sur un plan idéal, leur revendication principale. Mais, « dans la pratique, ils se présentent comme contraints à exercer une force répressive, sous les pressions de forces extérieures (institution, parents…), en même temps qu’ils vont trouver des arguments à l’appui de cette répression… ». Ils trouvent à la fois des limites et un soutien en l’institution. Ce côté paradoxal de leur attitude a bien été perçu par GIAMI qui va jusqu’à affirmer que « l’interdit posé par l’institution rendrait service aux éducateurs qui l’assument en la reprenant à leur compte » ! Cependant il atténue ce jugement en remarquant qu’elles (les contraintes institutionnelles) « ont été mises en pratiques de façon souple » et que les éducateurs « se sont contentés d’exercer une surveillance discrète auprès des pensionnaires. »





A propos du malaise des éducateurs

Après le visionnage à l’AFFERTES d’un film concernant des « accompagnatrices sensuelles ou parfois sexuelles » en Hollande et en Allemagne, je décidai d’en parler avec l’équipe éducative du foyer APEI dans lequel je suis en stage. J’ai eu la surprise d’apprendre que, il y a une vingtaine d’années, certains éducateurs avaient emmené un résident rendre visite à une prostituée. Celui-ci était en demande forte, n’ayant jamais eu de relations sexuelles bien qu’âgé de plus de cinquante ans.
Le discours de ces éducateurs, à l’époque, était pour la reconnaissance du droit à la sexualité des handicapés ce qui était, bien sûr, une attitude très en avance sur « le bien-pensant » de ces années-là.
Ces deux éducateurs, qui sont devenus depuis les fondateurs de l’association, sont maintenant directeur et directeur- adjoint de cet établissement et leur discours sur ce sujet a beaucoup évolué. Leur association étant gérée par un collectif de parents, ces ex-éducateurs ont bien été obligés de prendre en compte l’avis de ceux-ci pour élaborer le règlement intérieur du foyer, l’aménagement des chambres, etc. Donc, peu à peu, l’association a réprimé la sexualité de ses résidents et les deux ex-éducateurs, maintenant dirigeants, sont passés d’un positionnement permissif à un positionnement répressif de toutes formes d’expression de cette sexualité.
Au-delà du changement d’opinion de ces ex-éducateurs c’est la mise en évidence du poids des opinions des parents de handicapés sur l’attitude des éducateurs et sur l’institution elle-même. Si ce poids est relativement léger au niveau de la gestion éducative et financière de l’établissement, il est pesant dès que l’on aborde la sexualité des résidents. Selon GIAMI, « le discours des parents sur la sexualité (prédominance de l’affectivité et désexualisalisation)… fonctionne comme un élément supplémentaire de détermination extérieure des conduites, d’autant plus que les parents occupent une position de pouvoir qui donne force de loi à leurs exigences. »
Il est donc évident qu’il y a conflit entre les positions des éducateurs et celle de l’Institution soumise à la pression parentale et que, devant « la multiplicité des positions extérieures entre lesquelles l’éducateur tente d’élaborer sa propre position » … « l’éducateur tisse un réseau complexe de justifications et de rationalisations des conduites qu’il est contraint d’adopter ».


CONCLUSION



Qu’est ce que les parents et les éducateurs veulent dire lorsqu’ils parlent de sexualité ? Il apparaît que chacun des deux groupes a une vision différente de cette notion et que, à l’intérieur même de chaque groupe, les divergences sont parfois très fortes.


D’un côté, les parents déclarent que leur enfant n’est pas « concerné par la sexualité » mais qu’il manifeste une affectivité débordante dénuée de toutes arrières pensées sexuelles. La personne handicapée aurait donc une sexualité enfantine, donc désexualisée.

De l’autre, les éducateurs construisent une représentation de la sexualité des personnes déficientes qu’on peut qualifier de « sauvage » et d’incomplète. En effet, ils mettent en évidence le côté provocateur et visible de cette sexualité comme la masturbation et les manifestations agressives. De plus, la sexualité des garçons est souvent décrite comme brutale, directe, impulsive, libidinale alors que celle des filles serait plus affective. Ils prétendent également que les adultes handicapés mentaux sont incapables d’avoir des rapports sexuels complets tout en affirmant - en contradiction avec leurs dires précédents - exercer une surveillance stricte pour empêcher que ces rapports aient lieu dans l’institution. En résumé, les éducateurs comparent la sexualité des personnes handicapées mentales à celle des adolescents où la dimension érotique et ludique est forte.


A ce niveau, les éducateurs et parents semblent donc se trouver en opposition fondamentale, opposition consciente induisant un impact négatif sur la personne handicapée, impact négatif qu’ils attribuent, bien sûr, à l’autre groupe. Les parents reprochent aux éducateurs leur rôle d’incitateurs de la sexualité de leur enfant, tandis que les éducateurs pensent que la négation de cette sexualité aurait ce même effet incitateur.



A. Les représentations de l’autre groupe

Cependant dans leur discours, les parents et les éducateurs se veulent « agents de changements » par rapport à l’autre.
Les éducateurs veulent faire évoluer le comportement (incohérent et affectif) des parents vers des attitudes plus bénéfiques pour leur enfant.
Les parents pensent que les éducateurs en général méconnaissent les besoins de leur enfant, qu’ils sont mal formés, voire « dévoyés ». Néanmoins ils semblent accorder à la direction de l’institution une certaine confiance.

B. Les représentations des conduites

L’enquête a mis en évidence le grand malaise qui accompagne les conduites et les compromis qu’il engendre.
En ce qui concerne les parents, leurs exigences (répression des manifestations de toute sexualité au sein de l’établissement) entrent en conflit avec les idéologies permissives des éducateurs, idéologies qui s’accommodent mal, il est vrai, avec les manifestations de la sexualité des personnes handicapées. Ainsi, les exigences institutionnelles et parentales semblent leur offrir un côté sécuritaire qu’ils ne récusent pas.

En ce qui concerne la contraception et la stérilisation, parents et éducateurs semblent d’accord sur la nécessité d’instaurer une contraception mais, pour les éducateurs celle-ci doit faire l’objet d’une « négociation » avec l’enfant intéressée. De plus, ils sont farouchement opposés à la stérilisation alors que celle-ci rencontre les pleines faveurs des parents attirés par son côté définitif et rassurant.

L’ouvrage, en partant de constats qui semblent opposés, montre que, néanmoins, les parents et les éducateurs arrivent à adopter des conduites convergentes dans la gestion de la sexualité des personnes handicapées. Qu’elles soient présentées comme des « anges » par les parents ou comme des « bêtes » par les éducateurs, c’est, en fait, la dimension génitale qui est réprimée. « Le malaise ressenti à l’égard de la sexualité des personnes handicapées aurait donc son origine dans la possibilité d’accéder à une sexualité, à une existence dite normale ».


Ce livre m’a beaucoup éclairé sur la divergence de représentations de la sexualité des handicapés par les éducateurs et par les parents. Il m’a obligé à réfléchir et analyser ma sexualité, mes interdits, mes tabous, mes phantasmes … et d’essayer de voir quelles répercussions cela pouvait avoir sur ma vision de la sexualité des handicapés. Une introspective fructueuse mais aussi un peu traumatisante.

Anna

Re: l'ange et la bête: fiche de lecture

Message non lu par Anna » 10 juin 2009 21:53

bonjour! moi aussi je dois réaliser une fiche de lecture (ma premiere) sur ce bouquin. Je comprends que c'est un peu tard de le demander,mais si il y a de gens qui l'ont fait et pourraient me l'envoyer par mail, vraiment ça me sauvera! merci d'avance.
anna
aruki7@gmail.com

Dahmoune

Re: l'ange et la bête: fiche de lecture

Message non lu par Dahmoune » 31 juil. 2009 09:51

Bonjour à tous, je cherche désespérément le livre. il y aurait quelqu'un qui pourrait me le vendre. j'en ai besoin pour faire un travail dessus.ou sinon me faire parvenir un écrit par email, ou une fiche de lecture. vous me rendrez vraiment un immense service, merci d'avance.

myrtha

Re: l'ange et la bête: fiche de lecture

Message non lu par myrtha » 15 sept. 2009 00:44

Merci de m'adresser la fiche de lecture, j'ai un sujet à traiter sur la sexualité

mia

Re: l'ange et la bête: fiche de lecture

Message non lu par mia » 14 oct. 2009 20:31

bonjour, est ce que quelqu'un d'entre vous vend le livre l'ange et la bête de Giami en occasion. il n'est plus en vente et j'aimerai bien l'avoir pour faire une fiche de lecture. merci!

Karine

Re: l'ange et la bête: fiche de lecture

Message non lu par Karine » 29 janv. 2010 16:57

Bonjour,
J'ai vu que tu as fais une fiche de lecture sur L'ange et La bete de Alain Giani l'année dernière.
Je dois également en faire une cette année et ce livre m'interressait bcp. Mais maintenant que je l'ai lu, j'ai un peu de mal à mettre en forme! Pourrais-tu m'envoyer la tienne et me donner des conseils. Merci

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