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Mes braves gens,
Oh, les cloches, oui vous tous autant que vous êtes, les voilà qu'elles reviennent en cette période printanière ! Ces cloches de Pâques, tradition religieuse, rite spirituel, sont ainsi devenues l'étendard d'une mascarade commerciale où même les parents sont prêts à vendre leurs enfants au diable pour quelques morceaux de chocolat, pourvu que ces derniers soient de qualité première ! Du chocolat noir à 70% de cacao issu des meilleures plantations de l'Amérique centrale, aux ganaches délicates préparées par les chocolatiers les plus renommés de Belgique et de France, en passant par les pralinés suisses qui font frémir de plaisir les papilles les plus exigeantes. Certes, ces friandises d'exception sont de véritables œuvres d'art, produits par les meilleurs artisans chocolatiers du monde, mais ne vous y trompez pas, elles restent l'instrument de cette farce organisée pour nous encourager à la dépense et qui nous éloigne chaque jour davantage de l'essence même de cette fête pascale !
Comme un chant sinistre et dissonant, ces cloches à croquer résonnent dans les rues et surtout s'entassent dans les paniers d'achat, clamant haut et fort leur triomphe sur la foi et la tradition ! Les vitrines des magasins se parent de leurs plus beaux atours, exhibant fièrement ces cloches dorées, prêtes à séduire les consommateurs eux-mêmes consommés, ces cloches que l'on prend pour des pigeons. Oui, c'est bien de vous que je parle, vous autres cloches humaines, qui vous précipitez, le cœur palpitant, les doigts prêts à être sucés, léchés et re-léchés – pourvu que l'objet de vos convoitises soit fondant –, vers les temples de Charlie et de sa grande chocolaterie pour y sacrifier vos deniers, les derniers, sur l'autel de la surconsommation... allant même taper dans la tirelire de vos enfants ! Parents indignes ! Ah, le bonheur... il n'est qu'éphémère, emprunt de ces illusions si savamment distillées par les sirènes du marketing.
Mais au-delà des cloches de Pâques, celles qui dépensent vous m'avez bien compris, il y a aussi ces autres cloches, celles et ceux qui se font tout autant berner par les passions printanières. Trompées par les douceurs de la saison, elles se sont laissées envoûter par le chant des oiseaux, le parfum des fleurs et les caresses du soleil, pour finalement se retrouver au pied du mur comme des cloches (!), non pas face à la dorure, mais à la dure réalité de la vie. À l'image d'une société qui s'égare dans les illusions du matérialisme et de la superficialité. Elles nous rappellent que, derrière les paillettes et les faux-semblants, se cache une réalité bien plus amère que l'on trompe par l'amertume agréable du chocolat, le plus noir, à nos fins palais, initiés à l'abondance des plaisirs les plus déraisonnables !
Mes braves gens, je vous l'affirme, nous sommes tous des cloches, d'une manière ou d'une autre. Le consumérisme nous engloutit bien plus vite que nos âpres appétits, autant que les mirages du bonheur artificiel, même si l'on doit garder l'oreille attentive pour ne pas rater ce tintement si particulier qu'on appelle le coup de cœur, un cœur que l'on devrait écouter plus souvent. Puissions-nous, un jour, retrouver le chemin de la sagesse et de l'authenticité, pour faire taire le chant funeste de ces cloches, écoutez : "Il est l'or mon seignor, il est l'or !" Elles résonnent, elles tintent à nos oreilles pour des pièces que l'on verse, simplement, en passant à la caisse : et ce sans contact ! De l'or qui ne teinte plus, qui l'eut cru ?
Et bien il n'empêche, et chut ne le répétez pas ! Ma foi, je crains que mon foie tout autant risque d'en prendre un coup...
Po3m.